lundi 6 juin 2016

Marina Bellezza, Silvia Avallone

J'avais eu un gros coup de cœur à la lecture de D'acier, le premier roman de l'autrice italienne. J'ai longuement hésité à prendre la version GF de son dernier roman jusqu'à l'arrivée de la version poche (qui va mieux avec mon exemplaire de D'acier). Je n'ai pas mis bien longtemps à le sortir de ma PAL et même si j'ai fini le livre samedi, je suis encore dedans.

Marina Bellezza, Silvia Avallone

Editeur : Liana Levi
Colleciton : Piccolo
Année de parution : 2016 pour la version poche
Titre en VO : Marina Bellezza
Année de parution en VO : 2014
Nombre de pages : 544

A lire si :
- Vous voulez découvrir une partie du Piémont Italien
- Vous voulez une belle histoire d'amour mais pas que
- Vous voulez des personnages authentiques

A ne pas lire si :
- Rien du tout, lisez le.

Présentation de l'éditeur : 


L’avenir est à réinventer dans cette vallée coincée entre des montagnes de granit. Une départementale bordée par les carcasses des filatures abandonnées mène à des villages silencieux, un no man’s land aux confins de l’Italie. Pour Marina, vingt-deux ans, un corps et une voix de déesse, le futur se joue résolument ailleurs. Sur les plateaux de télé qui métamorphosent les starlettes de province en divas. Pour Andrea, fils d’une famille de notables, l’Eldorado est à portée de main. Dans la ferme d’alpage de son grand-père. Mais les rêves de ces deux héros contemporains se cognent à l’amour impossible qui les unit depuis l’adolescence.
Silvia Avallone se montre une fois encore incroyablement douée pour cerner les failles de notre époque et les doutes de sa génération. Avec une profonde empathie pour ses personnages, elle compose un deuxième roman fougueux autour des thèmes de l’enracinement et de l’abandon.


Mon avis

Il est toujours très dur de parler de livre que l'on a vraiment aimé. J'ai moins de mal à donner mon avis sur des livres appréciés ou moins aimés que sur ce genre là. Il est encore plus dur de le faire sur des livres qui nous habitent même après lecture. Déjà que pendant la lecture, je n'attendais qu'une chose, l'heure de me mettre au lit pour pouvoir continuer cette histoire, après la fin, je suis toujours hantée par elle.

Marina Bellezza, c'est l'histoire de deux jeunes gens dans le Piémont Italien. Elle, qui donne son nom au livre, a vingt deux ans et compte devenir la nouvelle star de la chanson italienne. Lui, Andrea, vingt sept ans, ne rêve que de la ferme de son grand-père et des alpages. Tout semble les opposer et pourtant, depuis sept ans, ils vivent une relation amour-haine intense. Marina Bellezza pourrait se présenter comme un beau roman d'amour entre ces deux-là. Ce n'est pas le cas. Oui, il y a leur histoire mais il y a plus que ça. Et c'est ce plus qui m'a embarqué là-dedans.

Silvia Avallone est née et a grandi dans la région de Biella avant de déménager à Piombino (le nom doit vous dire quelque chose, il s'agit de la ville d'Anna et Fransceca, les héroïnes de D'acier). Elle choisit cette région-là pour son second amour et lui fait une véritable déclaration d'amour. Dès le premier chapitre, nous voilà embarqué dans le Piémont ravagé par la crise mais pourtant magnifique. Elle nous parle de cette terre, de ses habitants avec une infinie tendresse même lorsqu'il s'agit de dire les travers, la désolation, l'abandon par des italiens qui veulent voir si l'herbe est plus verte ailleurs. Elle le fait tout autant en parlant de ces jeunes qui reviennent sur les terres de leurs ancêtres afin de les faire revivre, qui embrasse la carrière difficile de marcaire (éleveurs de vaches et producteurs de fromage). Son histoire est portée par ce retour au pays de jeunes qui n'ont de toute façon plus rien à perdre.

Ces jeunes, ils sont représentés par Andrea. Andrea, le personnage qui m'a le plus parlé, bien plus que Marina. Il est, pour moi, le personnage central, bien plus qu'elle. C'est lui que l'on suit le plus souvent, c'est lui qui nous fait découvrir sa région. C'est un personnage a qui l'on s'attache vraiment de part son opiniâtreté mais aussi son amour pour Marina qui a tendance a détruire ce qu'il entreprend. Marina est l’élément perturbateur. Elle rêve de devenir visible, d'être connue, et pour cela, elle est prête à tout, même à laisser tomber ceux qui l'entoure, à détruire tout autour d'elle. C'est un personnage intéressant, remplie d'ombres, au passé dramatique. Malheureusement, c'est aussi une belle tête à claque (ce qui peut la rendre attachante tout comme particulièrement chiante). 

Mais les deux ont plus que leur amour destructeur comme point commun. Abandonnés, l'un par son père qui ne voit en lui que le mauvais fils, par son frère, parti vivre sa vie aux Etats-Unis, l'autre par un père volage et une mère alcoolique, ils se sont construits sur ce sentiment-là, ont beaucoup de mal à pardonner l'un et l'autre et surtout n'arrive pas à s'en sortir. Est-ce pour cela que Marina finit une nouvelle fois par laisser Andrea en plan ? Qu'elle fuit tout ce qui pourrait lui apporter du bonheur ? Surement. C'est aussi ça qui fait qu'Andrea justement veut mener sa propre vie, loin de ce que son père veut pour lui, loin de ce que représente son frère à ses yeux. Chacun à leur façon, ils vont faire en sorte d'oublier cela sans vraiment y parvenir. 

Il y a aussi les personnages secondaires, ceux dont on ne découvre qu'une petite partie. Il y a les parents des deux jeunes gens, représentant la vieille italie, celle qui finalement baisse les bras. Il y a Elsa, rivale et colocataire de Marina. C'est un personnage touchant, amoureuse d'Andrea depuis le lycée, de sa région depuis toujours. C'est peut-être aussi la plus lucide de tous. On retrouve aussi Sebastiano et Lucas, les amis d'Andrea, bloqués comme lui à Biella mais qui ne semblent pas vouloir faire grand chose pour changer ça. Une galerie plutôt complète pour peintre ce paysage italien sur fond de drame amoureux.

Et enfin, il y a l'écriture de Silvia Avallone. Mon coup de cœur pour celle-ci à la lecture de D'acier n'a absolument pas changé. Ni pour le talent de sa traductrice, Françoise Brun. C'est toujours aussi beau, emplie d'une poésie que je ne peux qu'apprécier. C'est aussi très vivant, très imagé. Et puis, elle écrit de manière fluide, agréable, qui donne envie de continuer jusqu'à pas d'heure.

Vous l'aurez compris, ce fut pour moi un énorme coup de cœur. Le roman me parle énormément et pas seulement à cause de mes racines italiennes (ma famille du côté de mon grand-père maternel vient du Piémont, de Cesana Torinese à côté de la frontière avec la France). Comme pour D'acier, il y a là-dedans quelque chose de merveilleux, de beaux malgré des dehors moins enchanteurs. Et puis, il faut bien le dire la plume de Silvia Avallone est tout bonnement géniale.

Le désir fait partie de la vie, au même titre que la violence. Devenir adulte, c'est gérer le désir et la violence 
Ils étaient tous comme ça par ici, les villages : abandonnés, volets fermés, enseignes éteintes. Eux, pourtant, ils n’avaient pas eu envie de partir, au contraire : leurs sentiments, leur sens de l’orientation, tout leur était dicté par ces routes, par ces montagnes. 
L'idylle, par définition, ne peut pas durer. Mais elle advient.

2 commentaires:

  1. J'ai lu d'Acier, que j'ai bien aimé. Et j'ai acheté Marine Bellezza en poche mais il est encore dans ma PAL, cet article donne envie!
    Courtoise
    www.courtoise.wordpress.com

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    Réponses
    1. D'acier est un très bon roman, Marina Bellezza est encore au dessus, je trouve. On retrouve beaucoup de chose qui se trouvait plus au moins dans le premier livre mais à un autre niveau. Je trouve vraiment que Silvia Avallone a réussi un parfait second livre (ce n'est jamais simple) avec une histoire et des thèmes géniaux.
      j'espère que tu l'aimeras autant que moi

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