A trente et un ans, je me lance enfin pour lire du Simone de Beauvoir. Je voulais découvrir la femme par ses écrits. Et quoi de mieux pour ce début de découverte que les mémoires de ses jeunes années ?
Mémoires d'une jeune fille rangée, Simone de Beauvoir
Editeur : Folio
Collection : /
Année de parution : 2008
Nombre de pages : 473
A lire si :
- Vous voulez découvrir Simone de Beauvoir
- Vous aimez les autobiographies
A ne pas lire si :
- Vous aimez quand il y a beaucoup de dialogue
Présentation de l'éditeur :
Je rêvais d'être ma propre cause et ma propre fin ; je pensais à présent que la littérature me permettrait de réaliser ce vœu. Elle m'assurerait une immortalité qui compenserait l'éternité perdue ; il n'y avait plus de Dieu pour m'aimer, mais je brûlerais dans des millions de cœurs. En écrivant une œuvre nourrrie de mon histoire, je me créerais moi-même à neuf et je justifierais mon existence. En même temps, je servirais l'humanité : quel plus beau cadeau lui faire que des livres ? Je m'intéressais à la fois à moi et aux autres ; j'acceptais mon "incarnation" mais je ne voulais pas renoncer à l'universel : ce projet conciliait tout ; il flattait toutes les aspirations qui s'étaient développées en moi au cours de ces quinze années.
Mon avis
Simone de Beauvoir est particulièrement connue pour son engagement féministe, sa vie avec Sartre et bien sûr son oeuvre littéraire et philosophique. Mais si je connais tout cela (enfin pas vraiment son oeuvre puisque je n'avais pour l'instant rien lu d'elle), elle restait pour moi un mystère. Alors pour la connaitre, j'ai voulu commencé non par un de ses romans mais par ses premières mémoires. Parce qu'elle en a écrit d'autres. Mémoires d'une jeune fille rangée relate sa vie de sa naissance à la fin de ses études, soit jusqu'à ses vingt et un ans.
Il est souvent compliqué de donner son avis sur des mémoires. Soit on apprécie le personnage soit pas du tout. L'auteur se livre, livre ses souvenirs, parfois les enjolive, parfois pas. C'est un exercice difficile pour lui mais aussi finalement pour le lecteur. On se demande ce qui est vrai, ce qui a pu être ajouté par la suite, si les souvenirs sont exacts. On cherche l'auteur au moment de l'écriture avec ses idées plus mûres, avec le contexte de l'époque d'écriture. J'aime les autobiographie personnellement pour tout cela. Non pour découvrir la vérité sur certaines années de l'auteur, mais pour voir comment il se souvient de tout cela, comment plus tard, il se voit.
Il y a dans ce livre beaucoup de la Simone de Beauvoir plus âgée, dans la manière dont elle écrit, dont elle voit les choses, dont elle se revoit. Au lieu d'une succession de faits et gestes, marquant ou non, elle part d'une chose, parfois anodine, pour développer sa pensée. Ici, nous ne connaîtrons pas complètement son enfance, son adolescence. Nous ne suivrons pas ses pas, du moins pas tous. Et c'est assez appréciable de la voir porter son jugement d'adulte sur l'enfant qu'elle a été. Sans parler du fait que je préfère largement lire ses interrogations que ce qu'elle a pu faire.
Surtout que de part sa formation de philosophe, elle s'interroge beaucoup sur pas mal d’événements de sa vie. Sans parler du fait qu'elle a toujours cherché sa vérité sur la vie. La jeune Simone, ses interrogations, la manière dont elle voit le monde, tout cela est vraiment passionnant. J'ai aimé voir comment elle a construit sa pensée, au fur et à mesure des années, des rencontres aussi. J'ai adoré son amitié avec Zaza, la distance et en même temps le rapprochement suivant les époques de leur vie. J'ai aimé voir la jeune Simone un peu trop élitiste quant à ses amitiés, voire juste quant aux gens qu'elle croise. Elle m'a souvent rappelé une autre personne (moi-même en fait) qui se jugeait supérieure aux autres parce qu'elle se passionnait pour la littérature et des questionnements plus métaphysiques que les jeunes de son âge. Je crois d'ailleurs que c'est cela que j'ai le plus aimé en cette Simone de Beauvoir jeune. Une certaine ressemblance avec celle que j'ai été, sans aller dire en même temps que je suis comme elle. J'ai aimé retrouvé les mêmes problèmes chez elle que chez moi à l'adolescence, cette quête d'une vie qui mérite d'être vécu et n'ont pas subie. Et c'est amusant de se dire que quelques 80 ans plus tôt, les préoccupations de la jeunesse n'était pas si loin des nôtres.
Pour finir, parlons un peu de la Simone de Beauvoir féministe qui commence à voir le jour dans ses lignes. Elle, fille de la bourgeoisie dont le seul rôle semble être de faire un bon mariage (arrangé de préférence), se révolte contre tout cela. Elle veut être l'égale des hommes. A une époque où cela n'est pas si simple, elle va pourtant essayer et même parfois y arriver. Et même si elle ne met alors pas le mot, on sent la féministe en elle. Son féminisme se construit petit à petit parfois par à coup. Elle le voit alors comme une lutte contre ses parents, contre sa classe sociale, contre une vie qui ne lui rapporte rien. En fait rien ne la prédestiné à être la féministe que l'on connait. Des parents bourgeois, une mère pratiquante et parfaitement soumise à son mari, qui inculque à ses filles la même éducation qu'elle a pu avoir, une famille où l'homme est toujours vu comme le supérieur. Ce sera surement les paroles de son père, qui lui disait qu'elle avait un cerveau d'homme, qui la menera dans cette quête de l'égalité hommes-femmes.
Au final, je sors de ma lecture avec une grande opinion de la jeune Simone de Beauvoir et de l'autrice qu'elle est devenue. J'ai adoré son écriture, sa manière de voir les choses, de se revoir aussi, sans en faire forcément trop. Elle livre son enfance sans trop l'enjoliver, voire même en étant très critique sur elle-même. Cette première approche de Beauvoir a été un plaisir et je compte bien la lire encore et encore (j'ai le choix, des romans, d'autres mémoires...).
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire