vendredi 9 janvier 2015

D'acier, Sylvia Avallone

Je me souviens avoir pris le livre au départ pour sa couverture. Et puis, j'avais vraiment envie de voir ce que les italiens pouvaient écrire. Et puis, la quatrième était sympa aussi...

D'acier, Sylvia Avallone

Editeur : Liana Lévi
Collection : Piccolo
Année de parution : 2011
Titre en VO : Acciaio
Date de parution en VO : 2010

A lire si :
- Vous voulez une histoire d'adolescente mais pas que
- Vous voulez une belle histoire d'amitié
- Vous n'avez pas peur de plonger dans les banlieues italiennes

A ne pas lire si : 
- Vous voulez un livre optimiste en tout

Présentation de l'éditeur :

Il y a la Méditerranée, la lumière, l’île d’Elbe au loin. Mais ce n’est pas un lieu de vacances. C’est une terre sur laquelle ont poussé brutalement les usines et les barres de béton. Depuis les balcons uniformes, on a vue sur la mer, sur les jeux des enfants qui ont fait de la plage leur cour de récréation. La plage, une scène idéale pour la jeunesse de Piombino. Entre drague et petites combines, les garçons se rêvent en chefs de bandes, les filles en starlettes de la télévision. De quoi oublier les conditions de travail à l’aciérie, les mères accablées, les pères démissionnaires, le délitement environnant… Anna et Francesca, bientôt quatorze ans, sont les souveraines de ce royaume cabossé. Ensemble, elles jouent de leur éclatante beauté, rêvent d’évasion et parient sur une amitié inconditionnelle pour s’emparer de l’avenir

Mon avis 

Depuis que j'ai lu Comme Dieu le Veut et que j'ai donc découvert un peu la littérature italienne, j'ai très envie d'en découvrir plus. J'ai acheté D'acier il y a quelques temps déjà, attirée par la couverture. La quatrième me plaisait aussi. J'aime toujours les histoires "prolétaires", celle dont les personnages se rapprochent un peu plus de moi que les jeunes beaux, riches et parfois crétins. 

D'acier, c'est avant tout l'histoire d'Anna et Francesca durant une année, celle de leur quatorze ans. C'est aussi celle de leurs familles, les hommes travaillent à la Lucchini, l'usine tentaculaire d'acier, les mères sont ou à la maison ou au travail. On va les suivre, tous, durant une année complète, celle où l'amitié des deux filles va prendre un coup, où elles vont passer de l'enfance à l'âge adulte, celle aussi où les tours jumelles vont être détruites. Et si Anna et Fransceca tiennent le devant de la scène, on ne va pas oublier les autres habitants de Via Stalingrado et la misère qui s'en échappe. 

La première chose qui frappe dans ce roman, le premier de Sylvia Avallone, c'est le style de l'auteure. Au début, il surprend, parce qu'elle mélange les points de vue allégrement, qu'elle passe d'une écriture recherchée à plus "vulgaire". Et puis, on s'y habitue très vite, elle nous donne le ton, et c'est parti. Il est vrai que parfois, on peut se perdre un peu, mais, c'est le genre d'écriture que j'apprécie aussi, une écriture vivante, qui te plonge direct dans la tête du personnage, dans le roman. Le style donne beaucoup au roman, il lui donne son âpreté mais aussi sa poésie.

Ensuite, passons aux histoires. Car si Anna et Fransceca sont les seules à apparaitre dans la quatrième, ce ne sont pas les seules que l'on va suivre. Elles vont être le fils rouge du livre, c'est tout leur entourage que l'on va suivre. Celui d'Anna se compose de son frère Alessio, travailleur à la Lucchini, vingt et quelques années, qui me fait penser à l'italien de base, le gros cliché quoi. Il sort en boite régulièrement, se drogue, c'est le gros macho, le roi de la cité. Il y a aussi son père, qui fait parti de la mafia locale et qui les laisse régulièrement tomber et sa mère, qui travaille, qui voudrait divorcer mais qui toujours retombe dans les bras de son mari. Côté Fransceca, la vie est bien moins simple. Le père est violent, bat femme et enfant, surveille sa fille à l'aide de jumelle lorsqu'elle est à la plage. La mère est au foyer, pauvre chose qui se laisse faire sans jamais rien dire, qui se promet de s'enfuir, de porter plainte mais ne le fait jamais. Autour d'elles, il y aussi les adolescents du quartier, ceux de l'âge des filles, les boudins dont Lisa (les filles "moches"), Massi et Nino, les garçons qui rêvent de prendre la place d'Alessio et de sa bande, Cristiano et Mattia, les amis d'Alessio... Avec tout ce petit monde permet de donner une bonne vue de ce qu'il se passe Via Stalingrado et aussi ailleurs finalement, car si le lieu existe, ce n'est pas le seul à être comme lui.

Et puis, le livre nous parle aussi du passage de l'enfance à l'âge adulte, de l'amitié exclusive entre deux jeune filles. Tout ne se passe pas bien pour elles. En une année, elles vont grandir, perdre leur innocence (et leur virginité aussi), découvrir le monde des adultes, découvrir la cruauté de celui-ci mais aussi, parfois, ce qu'il peut avoir de beau. L'histoire de ces deux jeunes filles est touchante, vraiment. Tout comme l'est celle de leur entourage. Sylvia Avallone ne tombe pas dans le misérabilisme (vu le sujet, elle aurait pu), elle ne tombe pas non plus dans le "tout est noir". Elle réussit à mettre du soleil dans ce qu'elle écrit, parfois dans une seule phrase, parfois sur tout un chapitre. Elle insuffle un peu d'espoir dans un monde qui semble ne pas en avoir. 

Cela en fait du coup non pas un livre triste (même si j'ai bien failli versé ma larme à plusieurs moments) mais quelque chose de vrai et même de solaire. Les histoires y sont belles, malgré la noirceur de beaucoup. Bref, j'ai aimé, beaucoup beaucoup, et j'espère pouvoir lire d'autres bouquins de l'auteure.

"Ça veut dire quoi, grandir dans un ensemble de quatre barres d'immeubles d'où tombent des morceaux de balcon et d'amiante, dans une cour où les enfants jouent à côté des jeunes qui dealent et des vieilles qui puent? Quel genre d'idée tu te fais de la vie, dans un endroit où il est normal de na pas partir en vacances, de ne pas aller au cinéma, de ne rien savoir du monde, de ne pas feuilleter les journaux, de ne pas lire de livre, où la question de ne pose même pas?"

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire