mercredi 27 mai 2020

Le Régiment Monstrueux, les Annales du Disque-Monde, tome 29

Que serait un challenge fantasy sans le maître de la fantasy anglaise ? Il me fallait bien mettre au moins un livre de Terry Pratchett dans ma PAL pour le mois de la fantasy (j'aurais pu en mettre autant qu'il y a de catégorie en fait, ça aurait été cool aussi)(mais je n'y pense que maintenant, c'est dommage). Aujourd'hui, on part donc en Borogravie à la suite d'un régiment un peu particulier.

Le Régiment Monstrueux, les Annales du Disque-Monde, tome 29

Editeur : Pocket
Collection : Fantasy
Année de parution : 2012
Titre en VO : Monstrous Regiment
Année de parution en VO : 2003
Nombre de pages : 511

A lire si :

- Vous aimez l'humour anglais
- Vous avez envie d'avoir des héros qui ne se laissent pas marcher sur les pieds

A ne pas lire si :

- Vous êtes un gros macho ou vous êtes resté coincé des siècles en arrière.


Présentation de l'éditeur : 

Le frère de Margot Barrette est parti au front et ne donne plus aucune nouvelles. Qu'à cela ne tienne, la jeune femme se déguise en homme et s'engage dans l'armée. Ce qui brave tous les interdits de son pays, la Borogravie, où les femmes n'ont même pas le droit de porter des pantalons... Voilà Margot plongée en pleine guerre, entourée par de nouvelles recrues tout aussi inexpérimentées qu'elle - dont un vampire, un troll et Igor - sous la houlette d'un caporal sadique. Ce monstrueux régiment saura-t-il vaincre l'ennemi ?

Challenge mois de la fantasy

Le régiment monstrueux entre dans les catégories suivantes : 
- La fureur de Smaug, avec le troll et le vampire
- Dame Arwen puisque Margot est l'héroïne de cette aventure, et qu'elle n'est pas la seule.
- Tolkien, roi de la fantasy, Pratchett et n'importe laquelle de ses annales sont des incontournables
- Du Hobbit au SdA, les Annales, c'est pas moins de 35 tomes quand même (et il ne m'en manque plus que huit)
- Oh Gandalf, ça doit bien faire deux ans qu'il est dans ma PAL lui (comme j'essaie de lire les annales dans l'ordre de parution, les dernières restent souvent longtemps dans ma PAL)

Mon avis

Comme je le disais, j'ai ce Régiment Monstrueux depuis bien longtemps dans ma PAL. Je comptais pouvoir trouver et lire Procrastination et Ronde de Nuit avant de le lire (les deux ne sont pas encore sur mes étagères donc, mais comme j'ai lu La Vérité il n'y a pas si longtemps que ça (un an quoi), ça me paraissait normal). Enfin, vous me direz, ce n'est pas bien grave, le Régiment Monstrueux ne fait pas partie de l'une des "sous-séries" des Annales (malgré la présence de Vimaire et de quelques agents du guet)(une présence presque anecdotique en fait). Bref, il s'intégrait trop bien dans le mois de la fantasy pour ne pas le lire (et puis Pratchett me manquait). 

Margot Barrette a tout prévu. Elle a observé, s'est entrainée, a coupé ses cheveux puis enfilé les vêtements de son frère. Elle est prête à affronter le monde sous les traits d'Olivier Barrette et à retrouver Paul, son frère ainé. Sans lui, elle ne pourra jamais reprendre la succession de son père et perdra la Duchesse, l'auberge familiale. Alors, elle se lance dans la plus grande aventure de sa jeune vie. Elle devient un homme, s'enrôle dans l'armée et part à la recherche de Paul. Tout cela contre l'avis de Nuggan, le dieu de la Borogravie, qui a ordonné que les femmes vêtues en pantalon ne sont que des abominations (comme les puzzles, les cailloux et bien d'autre chose d'ailleurs). Elle ne se doute pas une seconde qu'elle n'est pas la seule dans ce cas et qu'elle et ses compagnons vont changer le court de la guerre.

Il va être compliqué de parler du Régiment sans spoiler. En même temps, si comme moi, vous avez l'édition de chez Pocket, la couverture le fait pour moi. Donc, bon, allons-y. Cette fois, Pratchett s'attaque à pas mal de chose. La place des femmes dans la société, la guerre, la propagande sont les thèmes principaux de ce tome. Comme toujours, il fait ça avec son humour si particulier mais de manière fort intelligente. Si la quatrième de couverture m'avait laissé de marbre face à ce que j'allais lire, les quelques premières pages m'ont vite fait comprendre que j'avais une pépite sous les mains (bon ça arrive souvent avec Pratchett). 

Pour faire passer son message, il utilise le bon vieux trope de la femme déguisée en homme parce qu'il lui est interdit de faire telle ou telle chose en tant que femme. Et, il l'exagère le plus possible. Ainsi, si le lecteur pense au départ que seule Margot se déguise, il va rapidement se rendre que ce n'est pas le cas. Quasiment toutes les recrues de son escouade sont des femmes. Et elles ne comptent pas faire figuration. Dès le départ, elles mettent en déroute l'ennemi et continuent sur leur lancée. Aidées par le sergent Jackrum, une légende vivante quelque peu étrange, et du lieutenant Blouse, jeune homme pas très doué avec une arme à la main, elles vont arriver jusqu'à la ligne de front et découvrir qu'on leur ment depuis le début. Car l'armée borograve ne gagne pas. C'est même plutôt l'inverse. Nuggan, leur dieu, les a abandonné, l'Alliance retient prisonniers le plus gros des troupes, dont l'état-majeur. Rien ne va plus. 

Le Régiment Monstrueux est donc une histoire de femmes. Des femmes qui se battent en ce qu'elles croient, qui veulent échapper à un destin qui n'est pas le leur, qui surpasse la place où on aimerait bien les mettre. Alors, oui, elles sont dans l'obligation de se déguiser en homme pour ça. Mais leur plus grande réussite ne se trouve pas dans ce qu'elles font lorsqu'elles portent le pantalon. Elles restent des femmes avant tout. Et surtout, elle se montre plus déterminées que les hommes dans bien des domaines. J'ai apprécié que Pratchett nous fournisse plusieurs profils de ses dames. On a Margot, personnage principal qui se rend compte que sa place n'est pas là où elle le pensait, Biroute et l'Asperge, qui sortent de maison de rééducation, tout comme Pignole qui, elle, entend la Duchesse dans sa tête (elle a un petit côté Jeanne d'Arc pour ça), Igorina qui veut prouver que les femmes font d'aussi bon Igor (chirurgien) que les hommes, Chouffe partit chercher le père de son futur enfant... Chacune a un rêve, une aspiration, qui est bloqué par les idées qu'à mis Nuggan dans la tête de ses fidèles. Dans leur pays ultra patriarcal (qui portant ne croit plus qu'en la Duchesse(mais ça donne un aperçu de l'une des révélations finalement)), elles doivent apprendre à se faire de la place. Une place égale à celle des hommes. Ça passe donc par l'armée, ce qui va permettre à l'auteur de mettre un petit coup au nationalisme et surtout à la propagande qui va avec. Et sur ce dernier point, il est plutôt fort, notre Pratchett d'ailleurs. C'est un aspect que j'ai assez apprécié, et que j'ai trouvé particulièrement moderne en fait. Encore plus avec l'arrivée de Guillaume des Mots (que l'on a découvert avec la Vérité) et de sa presse. Forcément, à une époque où les médias sont capables de faire la pluie et le beau temps, il fallait bien mettre ce cher des Mots de la partie (et ça fonctionne tellement bien).

Ce livre est quand même ultra compliqué à chronique sans tout divulgacher (et j'en ai finalement beaucoup dit, je trouve). Il est assez complexe tout en restant une parfaite satyre humoristique comme savait si bien le faire Pratchett (vous ne savez pas à quel point cet homme, que je n'ai jamais connu personnellement, me manque). Du coup, je vais m'arrêter là. Et pour vous donner envie de le lire, je vais faire un truc que je ne pense jamais à faire ici, c'est posté deux extraits (je le fais plus souvent dans les stories de mon compte instagram, si ça vous intéresse) :

"Oublies qui tu étais Margot. Pense que tu es un jeune homme, voilà l'important. Pète bruyamment avec la satisfaction d'avoir fait du bon travail, déplace-toi comme une marionnette dont on aurait coupé deux fils au hasard, ne serre jamais personne dans tes bras et, si tu croises un copain, flanque-lui un coup de poing. Quelques années à servir au bar lui avaient donnée matière à observer. Aucun souci pour se retenir de balancer les hanches, au moins. Là non plus, la nature n'avait pas été généreuse.
 Et puis, il fallait maitriser la démarche du jeune mâle. Au moins, les filles ne balançaient que les hanches. Les gars, eux, balançaient tout ce qu'ils avaient en dessous des épaules. Tu dois t'arranger pour occuper beaucoup d'espace, se dit-elle. Ca te donne l'air important, comme un matou qui s'ébouriffe la queue. Elle avait beaucoup vu ça à l'auberge. Les gars voulaient passer pour des gros bras en réaction de défense contre tous les autres costauds. Je suis mauvais, je suis féroce, je n'ai pas froid aux yeux, je voudrais un grand panaché et ma mère m'a demandé de rentrer à neuf heures..." 

"-D'être de mauvaises filles, dit Biroute. Qui serait dupe, mon commandant ? L'ennemi voulait se débarrasser tranquillement de nous, et le général veut la même chose. C'est ça l'ennui avec les gars gentils et les gars méchants. Ce sont tous des gars !
-Est-ce qu'on aurait eu des médailles si on avait été des hommes ? demanda Chouffe.
-Ouaip. Certainement. Et Blouse aurait reçu une promotion sur le champ, j'imagine. Mais nous sommes pour l'instant en guerre, et ce n'est peut-être pas le bon moment...
-... de remercier une bande de femmes abominables, suggéra Margot."


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